RedSka : Rabbia e liberta ! Rage et liberté !
C’est dans le 79, au treizième Festival des Graillouteurs, le 31 octobre 2010 que nous avons rencontré le groupe italien RedSka, groupe présenté à maintes reprises dans notre émission. Gentiment, malgré les écueils de la langue et les faux amis, Il Duca (chanteur) et De Veggent (clavier) nous ont répondu longuement. Ce fut un moment chaleureux avant leur superbe concert qui en a fait skanker plus d’unEs !
Présentation du groupe, origine ?
RedSka s’est formé en 2001, en Romagne, en Italie. On a choisi d’être indépendant (NDR : en montant aussi leur propre label, One Step Records). Les cinq premières années nous mettions en avant le fait de jouer du Ska, et nous avons partagé l’affiche avec des groupes comme Banda Bassotti et Ska-P. Aujourd’hui, nous voulons revendiquer nos textes : nous ne chantons pas des choses mièvres genre « Ti amo » mais des paroles politiques et sociales, car nous voulons montrer un autre visage de la chanson italienne. En 2004, nous avons sorti notre premier album, Mi son sbagliato nel confondermi avec des titres ironiques et divertissants, qui a eu un bon écho sur scène. Pour le deuxième album, Le mie prigioni (Mes prisons en français), on a collaboré avec différentes personnes de Banda Bassotti et de Los Fastidios. Depuis quelque temps, nous jouons hors d’Italie, dans toute l’Europe. Il est difficile de faire de la musique aujourd’hui en Italie. La culture est morte avec Berlusconi.
D’où vient le titre « Le mie prigioni »?
« Le me pregioni » est le fruit d’une collaboration avec Cola, un chanteur italien : c’est une belle chanson contre la peine de mort qui parle aussi des personnes incarcérées qui sont en attente de décision de justice et de sortie. Cette cause fait aussi partie du combat antifa.
Pourquoi avoir choisi de mettre le titre « Rabbia e liberta » sur la compilation de soutien aux antifascistes russes ?
À la base, « Rabbia e liberta » est une collaboration artistique avec Enrico de Los Fastidios (NDR : Il chante avec eux sur ce titre). On a décidé de participer à cette compil, car nous sommes antifascistes. En Italie, peu de groupes parlent du problème des antifas russes.
Quels messages voulez vous faire passer au public à travers votre musique ? Et dans votre dernier album ?
Nous sommes proches des Rude Boys, nous ne nous définissons pas comme skinheads. Nous sommes antifascistes et antiracistes. Ce que nous aimons dans le ska, c’est toute l’atmosphère qui s’en dégage, et le contretemps mêlé à l’énergie du punk, nous permet d’amener des textes plus orientés. Notre univers c’est celui de la musique jamaïcaine, celle des années 1960-1970 en Angleterre, ainsi que la culture skinhead originelle ; ce terme n’a rien à voir avec l’utilisation qu’en font les médias (ce ne sont pas des nazis) ; nous tenons à le préciser car quelqu’un qui écoute du ska et du reggae doit savoir que celle-ci est née du mélange de cultures jamaïcaine et anglaise à travers le ska et le reggae. Le message de Redska est le suivant: nous sommes antifas, antiracistes, contre la peine de mort. On veut continuer le combat de nos grands-parents qui ont été résistants contre le fascisme et le nazisme. Ce n’est pas facile d’avoir ces idées en Italie. Car on a un gros problème : c’est un homme qui s’appelle Silvio Berlusconi (rires) et pour lui, Mussolini est un grand homme et Hitler est un showman ! Berlusconi possède tous les médias : journaux, TV. Donc les gens ne peuvent pas dire qu’ils ignorent ce qu’il veut ! C’est difficile pour nous de jouer dans des clubs.
Quand on joue en Italie, beaucoup ont le bras droit tendu, c’est le fait de quelques jeunes ados, qui scandent « Dehors les communistes » mais autour, le public ne réagit pas. Le problème, c’est que les Italiens en général ne se rappellent pas de leur passé. (NDR : on venait d’en parler la veille avec Los Fastidios qui constataient malheureusement qu’aucun travail de devoir de mémoire n’avait été fait en Italie par rapport au fascisme).
Vous faites des concerts de soutien ?
En Italie, on a joué pour des camarades de gauche ; en Allemagne, au festival antifa de St-Pauli, etc. Dans le passé (au temps du premier album), on jouait partout, mais aujourd’hui, on a décidé de
se produire avant tout pour des causes politiques et de choisir les lieux qui ont un message politique.
Êtes-vous venus juste pour ce concert ou êtes-vous en tournée en France ?
Non, on est venu pour ce festival, on sera en tournée en Allemagne (à la fin de l’année 2010) et peut-être en France par la suite. On essaye de jouer dans l’Est de la France quand on va en Allemagne, en Autriche, en Tchéquie : on est passé à Marseille, à Nancy et Strasbourg. Nous gardons un très bon souvenir de notre passage au Festival Mighty Sounds (à Prague) au milieu d’un parc, avec The Selecter, Ska-P, Irie Révoltés. On était le seul groupe italien.
Vos projets ?
On travaille au troisième album (La Rivolta qui sortira début 2012), encore plus antifa ; on parle de Carlo Giulani tué par la police, de Stefano Cucchi (NDR : mort en prison dans des conditions suspectes en 2009) ; on a aussi un nouveau morceau sur les culs-bénits, contre la religion. La religion et Berlusconi sont les deux problèmes de l’Italie. Notre message : Il n’y a pas de compromis avec Redska !
[ NDR : l’interview a été réalisée en octobre 2010 : Berlusconi était alors toujours au pouvoir en Italie… ]