Basée sur une histoire vraie, la narration nous entraîne sur les pas d’Alvar Nunez Cabeza de Vaca, un explorateur espagnol embarqué dans une expédition qui a découvert le sud des Etats-unis (notamment le Texas) et le nord du Mexique au début du XVIème siècle. Le titre de l’album est d’ailleurs directement issu du nom de ce personnage (« Cabeza de Vaca » signifie littéralement « tête de vache »).
Suite à des conditions météorologiques peu favorables pour la navigation à voile, tributaire d’un commandement déplorable exercé par le gouverneur du roi en charge de l’expédition, Alvar Nunez Cabeza de Vaca se retrouve, avec trois autres rescapés, à devoir arpenter des territoires inhospitaliers peuplés d’indiens. Sa foi chrétienne et son envie de vivre vont lui permettre de survivre dans les pires conditions qui soient. La particularité de ce conquérant réside dans le fait qu’il a accompli sa mission entièrement nu (comme le mentionne le sous-titre de l’album), après avoir perdu ses vêtements dans la première partie du récit ; mais comme les indiens vivaient également nus pour la plupart, ce détail n’en est plus un très rapidement au gré de la lecture.
« La particularité de ce conquérant réside dans le fait qu’il a accompli sa mission entièrement nu »
Le scénario ciselé par Eric CORBEYRAN est d’une fluidité jouissive. Cet auteur déjà connu pour son travail sur de nombreuses séries à succès (« Le chant des Stryges », « le régulateur », « Zélie et compagnie », « Le territoire », « Imago Mundi », « La conjuration d’Opale », « Le cadet des Soupetard », « Sales mioches », « Okhéania », « La loi des 12 tables », « Uchronie{s} »…) réussit à capter notre attention du début à la fin pour nous entraîner dans le sillage du personnage principal. Le graphisme, tout en finesse et délicatesse de Perréard HORNE, est magnifique. Le noir & blanc sied parfaitement à l’histoire et les lavis de gris donnent un modelé pertinent et dynamique aux paysages et à l’action. Une mention spéciale pour les illustrations pleine page qui sont vraiment très réussies.
Cette histoire nous rappelle aussi combien la colonisation a pu abîmer les relations entre les hommes de part et d’autre. C’était à l’époque où les migrations humaines étaient mues par la cupidité et la recherche de richesses, la soif d’évangéliser et l’envie d’aventures… De nos jours, les mouvements de population s’appuient sur d’autres motivations, mais ils sonnent comme un écho à la lecture de cet album. A méditer en tout cas !