Parmi tous les livres parus pour les quarante ans du MLF, on trouve ce gros livre, une réédition en fait, de l’ouvrage paru en 1997, avec nouvelle couverture, une belle photo d’une mujer libre. Les articles, écrits par des historien.nes, des sociologues, des anthropologues et des politologues du monde entier, nous parlent du rapport des femmes à la vie politique depuis le XVIe siècle, en Europe et en Amérique du Nord, avec un petit détour du côté des « citoyennes » d’Amérique du Sud et des femmes musulmanes en Europe. Il se divise en trois parties : « Au seuil de la modernité, les femmes peuvent-elles gouverner ? », « L’ère des révolutions », « Combats pour la démocratie ».
Le livre aborde des sujets peu traités, comme les formes de résistance des femmes esclaves dans la traite négrière ou la participation des femmes maronnes à la révolution haïtienne. Plusieurs articles débattent de la participation des femmes aux grandes révolutions occidentales, de l’action des résistantes aux régimes nazi ou fasciste mais aussi de la collaboration de certaines femmes avec ces mêmes régimes. Très intéressant aussi, un article sur « L’émancipation des femmes dans l’œuvre de Marx et Engels », l’évo- lution de leur point de vue au l des écrits et une comparaison de leur vision avec celle de Charles Fourier. Jusqu’au tiers du livre, ça va. Mais, malgré un article sur le féminis- me des années 1970 et la « troisième vague féministe », j’ai beaucoup moins aimé le chapitre de la n sur les « combats pour la démocratie » (l’accession au suffrage universel et la parité dans la vie politique), avec un net penchant pour le « succès politique des femmes nordiques ». Comme si, une fois la parité acquise, les objectifs du combats des femmes étaient atteints !
On retiendra que si les femmes n’ont pas toutes pris position politiquement aux moments-clé de l’histoire, cela était dû principalement au fait qu’elles étaient con nées dans la sphère privée. En dépit de cela, beaucoup participèrent activement aux révolutions qui ont fait avancer l’humanité ; cependant, à l’intérieur même de ces luttes, elles eurent le plus souvent un statut de subordonnées.
En conclusion : c’est un livre très intéressant pour qui s’interroge sur l’histoire des femmes, un domaine souvent occulté ; et qui, malgré son jargon, se laisse parcourir. On apprécie les descriptions et analyses voulues objectives mais on regrette le manque de prise de position politique des auteur.es. On déplorera aussi de la part de l’éditeur le manque de féminisation des noms communs, intolérable, pour un ouvrage qui parle (entre autres) des avancées des droits des femmes. Enfin, le prix de ce livre (33 euros) peut être un obstacle… / Ray