Le Tour du monde en 72 jours | Nellie Bly

Un reportage de Nellie BLY

  • Titre: Le Tour du monde en 72 jours
  • Auteur(s): Nellie Bly
  • Date de sortie: 2016
  • Éditeur(s): Éditions du sous-sol
Le tour du monde en 72 jours

Ce qui m’a intrigué en premier lieu dans ce bouquin, c’est la première de couverture : une jeune femme aux vêtements fin XIXe-début XXe, un petit sac à la main, et le titre expliquant clairement qu’elle a fait le tour du monde, à une époque où on imaginait plutôt les femmes faire le tour de la cuisine.
Puis, vient la découverte des premières pages où cette jeune journaliste raconte comment elle a réussi à convaincre le rédacteur en chef du New World – le journal qui l’employait – de l’envoyer réaliser un tour du monde en moins de temps que le héros du roman de Jules Verne, sorti quinze ans plus tôt, en 1873. Là, c’est dans la poche que ce récit m’accompagnera quelques temps, dans un wagon pour faire le tour de… Bordeaux.

Pas banal tout de même comme reportage journalistique : partir sur les traces de Phileas Fogg, le gentleman anglais qui fait Le Tour du monde en 80 jours dans le roman à succès de Jules Verne. Et le compte rendu du voyage est assez savoureux. Il y a d’abord les sentiments et les réactions que provoquent cette jeune femme dans la société de son temps : sympathie et enthousiasme d’un côté, curiosité, scepticisme et phallocratie de l’autre. Puis, il y a l’évocation d’un monde en pleine révolution industrielle. Le reportage est ainsi un peu un éloge du progrès, et notamment des transports : bateaux de croisière luxueux où la bourgeoisie se plaît à parcourir le monde pour ses affaires ou son plaisir.

« sympathie et enthousiasme d’un côté, curiosité, scepticisme et phallocratie de l’autre »

Et, enfin, c’est le regard que cette jeune femme porte sur son époque qui me semble le plus intéressant. Direct et brut. Nellie Bly décrit et livre ses impressions sur les paysages, les populations et les coutumes des pays parcourus : Europe, Egypte, Sri Lanka (Ceylan), Chine, Japon. Elle nous peint le tableau d’un monde en pleine colonisation où le transport se fait en carrioles, aux brancards portés par des hommes ; où l’on peut hésiter entre acheter « un petit garçon ou une petite fille » et opter finalement pour un petit singe… Bref, le monde vu dans les yeux des colonisateurs, une sorte de complément à nos cours d’histoire sur la période, sous la forme d’un reportage qui se lit comme un roman.

A noter, l’auteure est une pionnière du journalisme d’investigation. Elle a notamment réalisé un reportage sur un asile après avoir réussi à s’y faire interner, écrit sur les conditions de vie des ouvrières, et plus généralement des femmes. Elle a également interviewé l’activiste anarchiste Emma Goldman.